À Cuba aussi moins de 1 % de la population décide de son avenir
C’est devenu un slogan mobilisateur pour la majorité des habitants des États-Unis et du monde capitaliste. Moins de 1% de la population, composée de millionnaires, détient vraiment le pouvoir économique et politique et décide de tout ce qui est important dans différents pays.
Le VIe Congrès du Parti communiste de Cuba a adopté les “Lignes directrices” pour la politique économique et sociale, qui, selon l’avis des dirigeants de ce pays, doivent déterminées l’avenir de Cuba. Ces “Lignes directrices” n’ont pas été soumis au vote de l’ensemble du Parti, ni bien entendu à un référendum populaire. Les quelques centaines de délégués au Congrès, ne représentent que 0,05% de la population.
Et cela se fait au nom de l’article 5 de la Constitution, qui reconnaît le rôle dirigeant du Parti communiste dans la société cubaine, ce qui, cependant, rentre en contradiction flagrante et viole l’esprit de la souveraineté, de la démocratie et du républicanisme des textes spécifiques de plusieurs articles de la Constitution , tels que :
- L’article 1er qui stipule: “Cuba est un État socialiste de travailleurs, indépendant et souverain, organisé avec tous et pour le bien de tous, comme une République unitaire et démocratique, pour la jouissance de la liberté politique, la justice sociale, le bien-être individuel et collectif et la solidarité humaine”.
- L’article 3 qui signale. “Dans la République de Cuba la souveraineté réside dans le peuple, duquel découle tout le pouvoir de l’Etat. Ce pouvoir est exercé directement ou par le biais des assemblées du Pouvoir populaire et les autres organismes de l’État qui en découlent, dans la forme et selon les normes fixées par la Constitution et les lois.”
Aujourd’hui, tout le système politique, économique et sociale est fondé sur “le rôle dirigeant du PCC”, qui fonctionne selon le centralisme démocratique, où la première chose détermine la seconde, ce qui a pour conséquence que c’est une petite élite dirigeante qui détermine et décide de tout, pas seulement dans le parti, mais aussi dans la société.
Pas étonnant que ceux qui occupent les principaux postes au sein du gouvernement et du Conseil d’Etat, sont à la fois, les mêmes qui occupent des positions centrales dans le parti.
C’est à partir de ce groupe dirigeant, que sont élaborées toutes les lois qui sont publiées sous la forme de décrets, puis discutées et approuvées par l’Assemblée nationale. Aucune loi est sujette au référendum populaire comme cela devrait être le cas dans une démocratie directe, véritable.
Et le système représentatif du Pouvoir populaire et de l’Assemblée nationale ? L’Assemblée nationale est composée de moins d’un millier de députés, moins de 0,01%. 50% de ses candidats est désigné “d’en haut” et les autres 50% par des commissions électorales contrôlés par le parti dans les provinces et même s’ils ont la possibilité de prendre des initiatives législative reconnues, dans la pratique ils ne sont élus que pour approuver ce qui a été décidé au sommet.
Aujourd’hui, c’est cette Assemblée nationale, avec des députés quasiment désignés, qui élit le Conseil d’État et le Président du Conseil dÉtat et des ministres. Ce n’est pas le peuple qui le fait directement.
Donc je peux affirmer catégoriquement, qu’à Cuba comme ailleurs, moins de 1% de la population décide du sort de plus de 11 millions de Cubains, les plus de 99% restants.
Il est difficile, dans les circonstances actuelles, de tracer un chemin pour inverser cette situation. Celui qui devra être choisi, devra être pacifique et devra être créé au moyen du dialogue et de la négociation. Le sectarisme et l’obstination du parti-gouvernement nous empêche de prendre cette voie, contrairement à la gauche démocratique et socialiste qui n’est pas liée à des dogmes, des préjugés ou des exclusions. Cette gauche qui souhaite promouvoir un dialogue national sans exclusions.
À cet égard, nous rappelons que c’est notre compagnon Félix Guerra, poète, écrivain et journaliste, communiste de toujours, qui, en mars 2009 lança un appel au Congrès de la nation et ce fut notre compagnon Félix Sautié, journaliste, économiste, théologien et communiste de toujours, lui aussi, qui écrivit en 2007 un livre intitulé “Socialisme et réconciliation à Cuba. Un regard depuis l’intérieur”.
Si nous voulons que ces 99 % et plus de la population participent aux prises de décision à propos de son avenir, si nous prétendons que la socialisation et la démocratisation de l’économie et la politique, — le processus révolutionnaire —, continue à aller de l’avant et si nous voulons réduire les possibilités d’un retour au régime du déshonneur et du capitalisme, un régime plus vulgaire et plus grossier.
Il n’y a pas d’autre choix pour la gauche dogmatique, de promouvoir, par elle-même, et de rendre possible ce dialogue avec tous et pour le bien de tous, ceci dans la mesure où le gouvernement-parti n’accepte pas le défi.
Si c’est la droite qui mène la critique du modèle bureaucratique de type néo-stalinien, qui mène la lutte pour le dialogue, pour le respect des droits de tous les Cubains, pour la démocratisation du système politique, pour les libertés d’expression et d’association, pour le libre accès à Internet, pour la liberté électorale pour tous les Cubains et pour affronter l’arbitraire du “socialisme d’État”, c’est alors qu’on verrait garantie la restauration du capitalisme privé, de la démocratie bourgeoise et la fin de toute tentative socialiste à Cuba.
Pour ceux qui ne le comprennent pas : pour éviter que cela puisse se produire, c’est pour cela qu’avec certains compagnons, nous avons participé à la préparation et que nous avons signé l’ “Appel urgent pour un Cuba meilleur et possible“.
Pedro Campos
Observatoire critique de La Havane