Le 6e Forum social du réseau Observatoire critique de La Havane vient d’avoir lieu

Les samedi et dimanche 26 et 27 mai 2012 a eu lieu, au centre communautaire la Ceiba de La Havane, le 6e Forum social du réseau Observatoire critique.

L’Observatoire critique regroupe une myriade de projets autonomes qui ont en commun la volonté de promouvoir les initiatives visant à l’auto-organisation, à partir des idéaux de la gaucha anticapitaliste, anti-autoritaire, anti-bureaucratique. Ces forums  annuels se convertissent en un espace d’échanges d’expériences, de réflexions théoriques, non seulement pour les membres du réseau, mais ils permettent aussi de recevoir des invités de grande qualité intellectuelle venant de la société cubaine.

Le samedi, l’accueil qui fut réservé aux participants au centre communautaire la Ceiba fit honneur au caractère fraternel et solidaire des Cubains et des Cubaines. Le groupe Kende (con K) assuma avec talent les tâches liées à la production artistique. Le salon était décoré avec des pancartes et des drapeaux accompagnant les activités qui eurent lieu en différents endroits, elles contenaient des slogans qui soulignaient le caractère social de l’OC. Un réseau qui s’engage auprès du peuple, dont il fait partie, aux côtés des dépossédés et des discriminés. L’événement a été organisé avec le travail acharné des militants bénévoles qui réunirent les conditions idéales pour que se déroule cet événement. Ils durent prendre en charge les frais liés à certains services essentiels. Tout fut mis en œuvre dans un cadre où régnait la plus grande transparence et à partir d’un consensus démocratique.

Le projet communautaire « El Trencito » (le Petit Train) traça, grâce aux créations de Yadira et Ernesto, de délicieux chemins qui pavèrent les parcours menant aux différents lieux d’échange. Le défi que nous nous sommes fixé nous a permis de témoigner des capacités que nous avons à nous auto-organiser.

Jorge Luis Allemand fit une brève présentation des mouvements sociaux d’aujourd’hui, il témoigna de l’intérêt particulier, en cette époque de crise, pour les mouvements des peuples indigènes qui mettent en évidence leur maturité, pour les occupants de Wall Street et des usines argentines aussi, chacun de ces mouvements à sa manière, avec ses particularités. Ces mouvements rejettent généralement les vieux schémas, les structures rigides et autoritaires. Venant de l’Université des sciences informatiques, Mayda Gil et Idalis Quiñones témoignèrent afin de raconter une expérience très émouvante, à partir d’une initiative prise par des étudiants qui ne sont pas réticents à quitter les laboratoires d’informatique, pour mener des actions simples et banales auprès de gens qui sont dans la difficulté. Gisela Arandia, une intellectuelle de qualité, aborda un thème qui devient très important dans notre actuel Cuba :  les carences existants et les besoins de travailler pour éradiquer le fléau de l’inégalité entre les Blancs et les Noirs ou Métis.

Dans la deuxième partie de cette session, Adolfo Cabrera et Miriam Real présentèrent des initiatives de promotion culturelle : le projet Talent cubain, Garage 19 et Misceláneo. Luis Rondon disserta à propos des réseaux sociaux de type LGBT (gays et lesbiens) à Cuba. Allen Garcia en secoua plus d’un en nous invitant à un simple tour imaginaire à travers la journée d’un Cubain qui pourrait s’appuyer sur les technologies de télécommunications. Si toutes les conditions étaient réunies, il pourrait payer ses factures d’électricité, réserver des billets de transports afin de rendre visite à des parents dans une autre province, communiquer avec ceux-ci par mail ou SMS, se renseigner sur le temps qu’il fera le lendemain ou à propos des offres avantageuses faites par un magasin. Le tout sans même penser à un câble sous-marin qui ne mêle nulle part. Il termina avec une interrogation sur la façon dont ETECSA, la société nationale de télécommunications, investit des fonds pour des services très coûteux. L’intervention du professeur de l’Université de Matanzas, Harold Cárdenas, anima le débat. Il présenta l’expérience d’un blog qu’il fonda avec deux amis, le célèbre « la Joven Cuba », dont l’impact grandissant révèle la nécessité de prendre ses responsabilités.

Après la pause nécessaire pour faire le plein d’énergie, la partie matérialiste dont nous manquons pour ces rassemblements d’intellectuels, nous avons eu un débat dont les origines proviennent des conversations au cours desquelles nous philosophons afin d’améliorer ce monde, en commençant par notre propre pays. Et c’est là que  nous refusons d’accepter passivement les options que nous voyons se développer dans de nombreux groupes devenus réfractaires à l’approche de concepts qui mentionnent, ou sont clairement liés, au terme idéologie. Une ou deux questions furent mis à la disposition d’un panel afin de définir une conception critique du terme idéologie, afin qu’il perde son caractère désagréable pour les gens ordinaires. Les sociétés modernes ont-elles besoin d’une ou plusieurs idéologies ? Dans le principal panel, intervinrent le professeur Juan Valdés Paz, le poète Félix Guerra, le théologien de la libération Félix Sautié et deux penseurs activistes et membres de l’OC, Dmitri Prieto et Pedro Campos, pour compléter le mélange confectionné par les marxistes et les libertaires. En tant que modérateur de cette section, j’ai également eu le privilège de mettre ma petite cuillère à côté de celle de mes illustres amis, et nous avons rarement eu un débat aussi intense et vaste, avec l’intervention animée d’un grand nombre des auditeurs dans un échange très fertile avec les panélistes. Cet échange ne s’arrêta que devant la nécessité d’achever d’urgence la session afin de fermer la salle en fin de ljournée.

Les interventions dans tous les espaces de cette journée, ainsi que ceux du lendemain, furent recueillies, car nous tenons à les diffuser largement entre toutes les personnes intéressées. Des idées importantes furent soulevées et elles devraient créer de nouvelles motivations et de nouveaux axes d’action pour l’OC et ses amis.

Le dimanche, à la mi-journée, nous avons appris de manière inattendue, que d’autres réunions devaient avoir lieu le dimanche au centre communautaire la Ceiba. Plein d’enthousiasme, nous nous sommes rendus alors au tout proche parc des Martyrs de la Moncada, anciennement Marti, et sous l’ombre d’un Ceiba et l’immédiateté des monuments, nous avons terminé les sessions du Forum.

Les représentants des groupes de traditions culturelles et religieuses et les défenseurs de l’auto-organisation à Cuba avaient profité de la matinée pour présenter leurs points de vue sur ce que les traditions peuvent apporter à la gestion autonome de l’existence, dans le pays d’aujourd’hui et celui de demain. Jorge L. Allemand, Ramón Torres, Mario Castillo, Tato Quiñones, Verónica Vega et Wolette Tsehay donnèrent de sensibles leçons de fraternité, de liberté et de solidarité à partir de différentes sensibilités spirituelles et syndicales.

Alors que des artistes donnaient la preuve qu’ils pratiquaient un art engagé, nous avons contraint de nous transférer à un autre lieu, ce qui fut fait sans incidents, mais pas avant de prendre des photos très colorées devant la façade artistique et remercier les hôtes pour leur réception.

Ensuite, sous l’arbre symbolique qu’est la ceiba, nous avons continué nos débats en dissertant sur nos façons de voir la Constitution et nos droits. L’anthropologue Dmitri Prieto, le professeur de philosophie Juan Valdés Paz, et un grand nombre de participants donnèrent leur point de vue sur ces questions qui concernent tout le monde, et sur lesquelles il est impératif que nous ayons tous notre mot à dire. Les contradictions entre les diverses opinions individuelles provoquèrent un effet paradoxal et bénéfique. Tous tombèrent d’accord sur la nécessité de la participation démocratique, de la transparence et de l’égalité dans des cercles où l’on se fait entendre et où l’on écoute de façon responsable afin de ne pas traiter de questions où l’on parle au nom de l’autre ou sans consentement.

La session finale fut un amalgame passionné d’espoirs, de critiques ou de problèmes non résolus de notre société contemporaine, tels que le racisme, la discrimination et ce fut la confirmation que nous sommes bien là et capables de créer un autre monde avec plus de justice, de paix, d’amour, sans égoïsmes sans exploitations, chemin sur lequel nous voulons modestement avancer.

Rogelio M. Díaz Moreno

http://observatoriocriticodesdecuba.wordpress.com/

D’autres informations sur le Forum provenant d’Inter Press Service et de Havana Times :

http://news.caribseek.com/index.php/caribbean/cuba-news/item/14410-red-observatorio-critico-promueve-la-auto-organizacion

http://www.havanatimes.org/sp/?p=65300

http://www.havanatimes.org/sp/?p=65348


Enrique   |  Actualité, Culture, Politique, Société   |  05 30th, 2012    |