Cuba en panne totale d’électricité
A Cuba, qui traverse sa pire crise économique depuis trente ans, plus de 10 millions d’habitants sont privés d’électricité depuis plusieurs jours. Pénuries, manque d’investissement, émigration massive… Quelle est la situation ?
Réseau électrique obsolète, forte dépendance aux combustibles fossiles, manque d’investissements et embargo des États-Unis… Une grave crise accable Cuba, où la population vit presque sans électricité depuis vendredi.
Entre émigration massive et manifestations de ceux qui restent contre les pénuries en tous genres, voici un panorama de la situation sur l’île communiste :
Infrastructures énergétiques fragiles
Le black-out quasi total qui frappe Cuba depuis vendredi est une conséquence de la fragilité de son réseau électrique, qui dépend presque intégralement des combustibles fossiles. Mais l’île peine à en acheter, notamment à cause du renforcement de l’embargo que Washington lui impose depuis 1962.
La production d’électricité nationale provient principalement de huit centrales thermiques vétustes, dont certaines fonctionnent depuis plus de 40 ans et souffrent de pannes récurrentes ou sont en réparation.
Cuba exploite en complément cinq sites flottants loués à des entreprises turques en plus de groupes électrogènes, eux aussi alimentés par des combustibles.
Or, le pays ne produit lui-même qu’un tiers de ce dont il a besoin. L’île communiste dépend beaucoup du pétrole du Venezuela, son principal allié.
La Havane paie une partie de ses factures en lui envoyant des médecins. Seulement, le Venezuela semble avoir nettement réduit le volume des livraisons.
Selon des chiffres de la presse indépendante, Caracas n’a envoyé qu’environ 22 000 barils/jour à Cuba en septembre, contre 33 700 barils/jour en juin. Le Mexique et la Russie ont partiellement comblé ce manque.
En parallèle, le gouvernement cubain a lancé des projets de développement des énergies renouvelables. Mais le manque d’investissements et l’embargo américain ralentissent le processus.
La pire crise économique depuis trente ans
Inflation galopante, effondrement de la valeur du peso cubain sur le marché informel, productivité faible, déficit fiscal abyssal à 22 % du PIB, pénuries de liquidités… L’île traverse sa prise crise économique depuis 30 ans.
En réponse aux manifestations historiques du 11 juillet 2021, le gouvernement a fini par autoriser au mois d’août suivant le principe de l’entreprise privée. Une première en plus de 50 ans.
En juillet 2024, quelque 11 000 petites et moyennes entreprises (PME) étaient ainsi recensées dans ce pays centralisé, à l’économie planifiée.
Insuffisant toutefois pour répondre aux besoins de la population, victime d’un manque de vivres, de médicaments et d’autres biens de première nécessité, dans un pays où le salaire moyen s’établit à environ 5 000 pesos par mois (41 dollars).
Vagues d’émigration sans précédent
La crise économique a déclenché des vagues d’émigration sans précédent depuis le triomphe de la révolution cubaine en janvier 1959.
D’après les statistiques officielles, l’île compte en 2024 moins de dix millions d’habitants, contre 11,1 millions lors du recensement de 2012.
Plus de 700 000 Cubains sont partis aux États-Unis, de manière légale ou irrégulière, entre janvier 2022 et août 2024, selon le Bureau des douanes et de la protection des frontières américain. Un flux de départs auquel il faut ajouter ceux vers l’Amérique latine et l’Europe, pour lesquels il n’existe pas de données détaillées.
Manifestations et arrestations
La crise économique et les coupures de courant répétées ont été à l’origine des manifestations inédites du 11 juillet 2021. Ces mouvements ont fait un mort, des dizaines de blessés et des centaines de protestataires ont été emprisonnés.
La Havane avait alors accusé Washington d’être derrière les troubles.
Quelque 500 Cubains ont été condamnés à des peines allant jusqu’à 25 ans d’incarcération, selon les chiffres officiels. Des ONG de défense de droits humains et l’ambassade américaine sur l’île dénombrent eux jusqu’à 1 000 « prisonniers politiques ».
En 2022, d’autres manifestations, encore en réponse à des coupures d’électricité, ont abouti à des dizaines d’arrestations.
La nuit du 27 septembre de cette année-là, un black-out généralisé a frappé l’île alors que l’ouragan Ian balayait sa partie ouest.
En 2023, Cuba a connu une meilleure situation d’un point de vue de l’électricité.
Mais celle-ci s’est détériorée en 2024. Au mois de mars, des centaines de personnes sont de nouveau descendues dans les rues, à Santiago de Cuba et dans trois autres villes, pour réclamer « de la nourriture et du courant ».
Les États-Unis, l’Union européenne et l’Eglise catholique ont demandé la libération des manifestants emprisonnés.
Informations AFP