Pour une charte minimale des libertés. Atelier libertaire Alfredo López
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Entre les oligarchies, quelque chose appelé le peuple cubain
Notre Patrie est l’Humanité, c’est pourquoi nous croyons que – en tant que telle – elle ne se combine ni avec « et », ni avec « ou » (1).
Quelqu’un dira que nous rêvons trop, parce que nous osons imaginer Cuba comme un archipel sur la carte d’une planète située dans le passé demain. Ensuite, nous répondrons que pour ne serait-ce que penser à un avenir, nous avons besoin de minimums de liberté, d’équité et de justice, et nous en avons besoin MAINTENANT.
POUR UNE CHARTE MINIMALE DES LIBERTÉS :
1. Nous demandons la liberté pour tous ceux qui sont en prison pour avoir participé à l’explosion sociale du 11 juillet (provoquée par une politique économique d’exclusion et d’échec), sans jugements et sans condamnations, en rejetant toutes les affaires judiciaires. Qu’ils rentrent chez eux, maintenant !
2. Nous ne pouvons pas être libres si, en même temps, nous ne luttons pas contre toute exploitation économique, contre toute indignité sociale touchant les identités personnelles, y compris celles qui dépendent du genre, du territoire et de la racialisation, et contre toute déprédation écologique.
3. Compte tenu de la situation du peuple cubain, aucune force politique – que ce soit au nom de la « Révolution » ou de la « Démocratie » – ne peut être légitime si elle ne maintient pas au minimum les garanties suivantes :
- des soins de santé avec un accès universel et équitable pour tous ceux qui en ont besoin ;
- l’éducation, universelle et équitable, jusqu’au niveau universitaire, avec des allocations assurant un niveau de vie minimum aux étudiants dans le besoin ;
- garantie universelle que le travail et les prestations sociales soient supérieurs au niveau de vie minimum.
À quoi il faut ajouter :
- le droit de former des syndicats sur chaque lieu de travail, indépendants et non verticaux, c’est-à-dire que les employeurs et les dirigeants ne puissent en faire partie ;
- le droit de grève, pour toutes les catégories de travailleurs (avec des exceptions convenues socialement) ;
- l’obligation d’avoir des conventions collectives pour tous les lieux de travail
- l’interdiction des contrats de travail non écrits ;
- la liberté d’expression, de création, de pensée, d’auto-organisation et d’action sociale dans la solidarité, et toujours dans le respect des droits de tous les autres.
4. L’ensemble de la société cubaine a le droit de faire entendre sa voix par le biais des médias publics, et pas seulement ceux qui représentent l’oligarchie décisionnaire et ceux qui sont sélectionnés par l’oligarchie décisionnaire pour faire croire au « dialogue ».
5. La lutte contre la mort que nous avons vécue montre que nous pouvons nous auto-organiser au-delà des clivages idéologiques et face à ceux qui ont choisi de bloquer, de thésauriser et de précariser. Nous croyons que le meilleur avenir du peuple réside dans cette auto-organisation, également pour le travail, l’apprentissage et la satisfaction digne des besoins de tous pour le travail de tous.
6. Tous les totalitarismes doivent être combattus.
7. Nous ne sommes pas un pays pauvre, mais un pays appauvri. Ceux d’entre nous qui travaillent à Cuba, aujourd’hui pour des salaires insuffisants, sans même accès aux produits de base vendus en devises étrangères par l’oligarchie (avec des privilèges bien supérieurs à ceux de la majorité qui lutte pour survivre), sauront comment créer un pays meilleur. Nous sommes un peuple qui lutte. Cette lutte et cette création ne doivent pas être perturbées par des oligarchies décisionnelles étrangères ou nationales.
À bas le blocus des États (Unis ou non) contre le peuple de Cuba.
Atelier libertaire Alfredo López (collectif membre de la Fédération anarchiste d’Amérique centrale et des Caraïbes), région de Cuba, 24 septembre 2021.
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1. Référence au slogan « Patrie “et” vie » d’un certain nombre d’opposants aujourd’hui et au slogan « Patrie “ou” Mort » né durant la révolution de 1959.