À PROPOS DU PROCHAIN CONGRÈS DU PARTI COMMUNISTE CUBAIN
CONGRÈS ET LIGNES DIRECTRICES AVEC UNE ODEUR DE MIXTURE NAUSÉABONDE
Bref examen :
Dans le complexe échiquier politique national, caractérisé par des mesures monétaristes mises en œuvre par l’alliance du parti et de l’état, le 6e Congrès du PCC a été convoqué pour avril 2011.
La première chose à noter est qu’il aura lieu dans les délais prévus, plus de treize années ont passé depuis le Ve Congrès qui eut lieu en 1997.
La distance entre les deux événements, avec huit ans et six mois d’intervalle au-delà de ce qui est établi – sans même consulter les militants – est une violation flagrante des statuts du parti, ce qui pourrait être considéré comme un “coup de force politique”, alors que le congrès est l’organe suprême du PCC et que constitutionnellement il a plus de “force dirigeante que la société et l’État”
Et quelle coïncidence ! La même période s’est écoulée entre les 18e et 19e congrès du Parti communiste de l’Union soviétique (PCUS). Ce retard fut engendré alors, comme l’indique le rapport central du XXe Congrès, par la forte centralisation du pouvoir aux mains d’un seul homme et par le mépris que ressentait Staline pour les militants du parti.
À cela, il suffit d’ajouter une phrase connue de l’écrivain et philosophe américain Santayana : “Ceux qui n’apprennent rien de l’histoire sont condamnés à la répéter.”
Quelques flashs :
Après l’annonce du congrès, une brochure intitulée “Projet de lignes directrices pour la politique économique et sociale” a circulé à Cuba, c’est la base de prétendues analyses collectives (ou d’”un soliloque populaire ?”). Pour les débats à venir, des modérateurs sont actuellement préparés dans le cadre d’un séminaire qui bénéficie d’un cloisonnement strict.
Selon Cubaleaks (ex-Radio-Bemba), durant les séances, les portables ou tout appareil d’enregistrement ou de tournage seront interdits. Pourquoi cela si le débat doit “être transparent comme l’eau et ample comme la mer” ? “What is the secret opération ?”
Il est important de noter que, contrairement au barrage formé de livres (volumineux) sur les victoires passées et les gloires actuelles des principaux protagonistes de la Révolution, la brochure ne comporte qu’une seule et unique page pour rendre des comptes sur les responsabilité établies dans le domaine économique (page 5, introduction).
Pour la même raison, nous sommes informés que tous les dysfonctionnements et les échecs économiques (et c’est à pleurer !) ont été causés principalement par la faute de la situation à l’extérieur du pays (blocus, crise et cyclones) ou à cause de travailleurs inefficaces et du peuple en général qui, pour comble, est en train de vieillir. Ceci parce que les camarades citoyennes n’accouchent plus suffisamment de petits prolétaires.
Il est tiré parti de l’influence relative de la crise internationale pour expliquer l’énorme et endémique crise cubaine qui dure depuis cinq décennies, pour concentrer principalement les efforts du Congrès sur le développement économique. Bien que le titre du document contienne, laissant une impression cérébro-subliminale, les mots “politique” “économique” et “social” (illustré sous l’image patriotique d’une mer de drapeaux cubains.)
Cela permet d’éviter l’analyse des grandes questions politiques et sociales (dans un état cataleptique), qui nécessairement interagissent sur l’économie, et peuvent la faire avancer ou continuer à la paralyser comme cela été le cas jusqu’à aujourd’hui. Pour exemple : l’exercice des droits civils et politiques établis par la Constitution et les règlements de l’ONU souscrits par Cuba au début de 2008, à propos desquels rien n’a été mis en œuvre au niveau législatif, et sur lesquels le peuple n’a reçu aucune information.
Avec la vision de Marti :
Avec son point de vue incisif, Marti a écrit :
“L’esprit despotique de l’homme s’accroche avec un amour morbide à ses réalisations pour continuer à voir la réalité d’en haut et à commander en tant que propriétaire. Et une fois qu’il a goûté à cette jouissance, quand on veut le priver de son pouvoir, il lui semble qu’on lui arrache ses racines”.
Cette pensée de Marti explique la volonté d’hégémonie de la classe bureaucratique, dirigée par la “Génération historique”, dont ce sera comme on l’a annoncé le Ve Congrès. Cette génération qui redouble de manœuvres pour garder ses privilèges. Des manœuvres qui reposent sur des “conditionnements psychologiques” allant à l’encontre de la mémoire historique.
On répète inlassablement, selon l’argot de la jeunesse, une “chanson officialiste basée sur la metatranca (la langue de bois) et sur l’écho médiatique” sur les slogans : “maintenant, nous allons de l’avant”, “ce sont les mesures dont nous avons besoin”, “nous devons faire des changements tant que pouvons compter sur les dirigeants historiques” (à cette heure ?), etc, etc, etc.
Si vous faites des recherches à propos des éditions des journaux nationaux publiés avant et après chaque Congrès du PCC ou avant un “processus de rectification” vous verrez que c’est toujours la même chose.
Il arrive alors, comme l’énonça également Marti, notre héros national, que “la possession du pouvoir, durant de longues années, vous enlève le bon sens”. Et l’exercice prolongé du pouvoir, par ces mêmes personnes, aux principaux postes politiques de l’état et du pays (“marteaux et enclumes à la fois”) provoque des odeurs de mixture nauséabonde étant donné l’alchimie médiévale utilisée, tant ces gens s’entêtent à recycler sans fin l’étatisme. À savoir : c’est la nature réelle du modèle qui “ne fonctionne plus”, mais plutôt que de “changer tout ce qui doit être changé” ils préfèrent l’”actualiser”.
Un aveu au détour des textes, qui est aussi une preuve : “Personne ne pense que nous allons cédé la propriété, nous allons la gérer différemment”, a déclaré le ministre de l’économie et du plan (dans ce “nous”, on ne parle pas du peuple, bien entendu).
Gros plan sur les lignes directrices :
Le livret, plutôt qu’un document politique, s’avère être un “document administratif copier-coller”, écrit par des organismes officiels, qu’il est difficile à avaler. Rempli de drapeaux, de mots et de répétitions, il est dépourvu de propositions sur des paramètres ou des indicateurs concrets, ainsi que sur des dates ou des termes qui permettent de mesurer les réalisations. Et c’est si grave, comme on peut l’imaginer, que le document encourage à laisser les “Lignes directrices” aux caprices d’une hiérarchie habituée à ne pas rendre de “comptes clairs”, mais plutôt d’imposer leurs propres choix.
Dans le matraquage à nouveau utilisé, il est dit qu’il est important de “préserver l’essence du modèle socialiste qui réside sur la propriété sociale des moyens de production”. Cette déclaration en italique est vrai, mais elle est écrite en prose malicieuse, elle est utilisée pour identifier la propriété étatique et sociale, afin de montrer qu’elle existe à Cuba. Quand ni l’une, ni l’autre n’existent vraiment.
Dans la propriété sociale, les propriétaires sont les collectifs de travailleurs. Surgit alors le vrai sens de l’appartenance sociale : celle des moyens réels à disposition des travailleurs (comme dans le mariage, le titre juridique peut être utile, mais il n’est pas déterminant).
Dans la propriété étatique – comme c’est le cas aujourd’hui – la bureaucratie domine, elle gère les salariés comme des pions, elle empêche le développement des forces productives, renforce les structures à tous les niveaux et les rend inefficaces, même lorsqu’elle réduit ses effectifs par le biais du licenciement de 1,3 millions de travailleurs.
Cette chaîne du malheur est le “fruit” de ce que Lénine appelait le “capitalisme monopoliste d’État” et de ce que Marti qualifierait de nouvelle “forme d’esclavage” des prolétaires dans le cadre de la fonction publique.
Et ce capitalisme étatique, mélangé au “caudillisme”, à la toute puissance d’un seul dirigeant, donne pour conséquence le totalitarisme. C’est ce qu’on veut continué à vendre, principalement à travers les multiple pages et les 291 paragraphes de la brochure. Et ce en se cachant derrière des propositions incertaines sur la coopérativisation et la décentralisation.
En ce qui concerne la coopérativisation, un des piliers du socialisme réel, il va s’en dire à Cuba, les quelques “coopératives” agricoles n’en on que le nom. Et en termes de production et de services dans d’autres secteurs, les “Lignes directrices” prennent en otage la coopérative en imposant un “règlement général” qui sera une contrainte imposée depuis une officine “très haut placée”. Qu’Allah nous protège !
En ce qui concerne la “carotte” qui consiste à décentraliser le contrôle des ressources, la volonté de séparer le Pouvoir populaire (la structure de pouvoir où siègent les députés) de la gestion locale (et pourquoi pas les ministères ?), Il est insensé d’attendre de voir d’où vont “arriver les coups”. L’expérience a démontré qu’à chaque fois que le pays est confronté à une situation difficile on reparle de décentralisation et lorsque la situation s’améliore la nomenklatura recentralise avec plus d’enthousiasme encore qu’auparavant.
Pourquoi ne pas traiter, dans ce congrès, de l’autogestion socialiste dans les PME (petites et moyennes entreprises), à partir de laquelle les travailleurs, sur la base d’un plan national global, pourraient déterminer ce qu’ils produisent, combien et comment ? Et aussi décider des modalités de distribution des bénéfices après impôts ? Dans les grandes entreprises ce pourrait être grâce à la cogestion, à savoir : le partage de la direction entre l’État et les travailleurs.
Les aspects négatifs du “supra-gouvernement” rendent impossible de croire qu’enfin la “Troisième loi de l’Histoire m’absoudra”, la loi qui correspond au projet initial de Fidel Castro, sera voté. Le projet de départ (“aux ouvriers et aux employés le droit de participer à hauteur de trente pour cent aux bénéfices de toutes les grandes entreprises industrielles, commerciales et minières, y compris les centrales sucrières”) n’a pas été réalisé. Si une loi très médiatisée a réglementé les choses en insistant uniquement sur le perfectionnement des entreprises, JAMAIS la matérialisation des projets de départ n’a été permise.
Nous ne croyons pas que puisse être mise en forme ce qu’annonça Fidel à Camagüey le 4 janvier 1959 : “Quand on parle du droit de choisir librement ses représentants, je ne me réfère pas seulement au droit de choisir un président ou les autres cadres, mais aussi le droit des travailleurs à choisir leurs propres dirigeants“.
Cela n’a JAMAIS été mentionné. Ni maintenant, ni dans les Lignes directrices.
Rappelons, en outre, que, pendant le “plus sombre tunnel” de la Période spéciale dans les années 90, “Cuba s’est ouverte” à l’emploi à compte propre (commerçants et artisans), mais cela n’était considéré que comme un mal nécessaire par la bureaucratie. Dès que celle-ci “entrevit un peu de lumière”, elle se mit à combattre le secteur du travail à compte propre, à le décourager de diverses manières et jusqu’à supprimer les licences pour exercer. Sachant – qu’en sous-main – le secteur du travail à compte propre a toujours été considéré par l’État/Parti comme un ennemi des entreprises et des établissements bureaucra-étatiques.
Maintenant, les réglementations sur les impôts, les contrôles, les limitations, la sécurité sociale et les contraventions qui ont récemment été déterminé pour l’emploi à compte propre ne rendent pas attractive l’obtention de nouvelles licences pour exercer. Ces réglementations ne sont donc pas des outils efficaces pour que les travailleurs “disponibles” et ceux qui se retrouvent au chômage créent leur propre emploi.
En ce qui concerne la suppression des aides sociales, il est mentionné dans la brochure la nécessité d’en finir avec le quinquagénaire livret de rationnement. Cependant, si les Cubains auront à payer plus pour des produits qui ne seront plus protégés, il sera nécessaire de “faire voler en éclat” le très fort pourcentage de 240 % qui affecte le prix des marchandises dans les centres commerciaux et les boutiques. Ces produits que nos citoyens en général (non seulement la partie minoritaire qui reçoit de l’argent de l’étranger) doivent acheter obligatoirement depuis des années pour leur subsistance. L’un ne va pas sans l’autre. Ou non ?
Il faudrait également considéré ce qui a trait à certaines subventions et des services gratuits qui ont disparus pour le secteur civil et non pas pour les militaires. Privilèges qui ne peuvent être justifiées et qui créent des divisions au sein de la population.
À “l’extérieur” du Congrès :
Il a été officiellement déclaré que “dans ce processus c’est le peuple qui va décider.” Historiquement, ça n’a pas été ainsi et c’est contradictoire aussi avec les événements au niveau législatif et les dispositions concernant les temps “nouveaux”, comme on peut l’observer :
Fin 2008, le gouvernement imposa la loi de sécurité sociale malgré l’avis quasi unanime du peuple qui était contre l’extension obligatoire à cinq ans de travail en plus pour parvenir à l’âge de la retraite.
Paradoxalement, quelques mois plus tard seulement on annonça, “à partir des hautes sphères”, la décision unilatérale de licencier plus d’un quart des travailleurs du pays.
“Et la CTC (la Condération des travailleurs cubains, syndicat unique) ? Elle est toujours là, luttant pour encaisser les cotisations de ses adhérents et pour la commémoration des dates historiques.”)
Pendant ce temps, les députés ont pu être vus pendant la session parlementaire de juillet 2010 avec deux “sucettes” (la modification de la loi sur le trafic routier, et une autre pour créer une nouvelle province et la bureaucratie qui va avec). Le Conseil d’État, les ministres et les différents ministères (tout cela est la même chose) ont adopté, deux ou trois mois après et selon la “Sainte volonté”, divers règlementations sur des questions extrêmement importantes.
Voyons quelques exemples :
– tout ce qui est relatif à la “possibilité” de licencier 1,3 million de travailleurs ;
– la modification du Code civil pour prolonger le bail de terres de 50 à 99 ans, dans certains cas et à perpétuité, dans d’autres. Ceci pour commencer immédiatement à :
– mettre à disposition direct ou indirect des investisseurs étrangers des biens immobiliers construits et 16 grands terrains de golf, chacun d’eux avec des dépenses d’approvisionnement en eau correspondant à une population de 20 000 personnes ;
– prévision économique pour le quinquennat 2011-2015 ; en fonction de
– l’inepte unité économique (au-delà de l’intégration dans l’ALBA, le marché commun de différents pays d’Amérique latine) avec l’instable Vénézuela ;
– de plus sévères dispositions en cas d’interruption d’activité salarié :
– concernant l’emploi à compte propre, et dans ce cadre
– l’usage privé (obligatoire dans plusieurs cas) de travailleurs salariés, ce qui viole les principes directeurs au niveau idéologique, établis constitutionnellement, qui sont contraires au Code pénal.
(Plus tard, pour sauver les apparences, l’assemblée du Pouvoir populaire a approuvé avec “l’unanimité” et la docilité qui la caractérise toutes les décisions qui sont adoptées en catimini…).
C’est ainsi, que l’on continue continue à adopter des décisions, comme toujours sans consultation populaire et sur le dos de députés honnêtes, comprenant de grands investissements et des dettes très importantes. (Sur ce dernier thème, nous détenons des “records continentaux, mondiaux et olympiques”).
Pendant ce temps, “Cubaleaks” commence à diffuser des informations selon lesquelles les décisions devant émerger du Congrès sont prises depuis longtemps.
Et maintenant :
La phrase “prendre compte méticuleusement de tous les points de vue” a-t-elle été prononcée pour qu’on les prenne tous en compte ou pour faire des exercices abstraits de simples statistiques, comme dans le “Grand débat d’octobre 2007 ?”
Peut-on croire que dans ce “processus” le peuple sera véritablement le décideur ?
Ou, simplement et à nouveau, le Grand chloroformé ?
Daup Arencibia Miguel