Ray Fernandez. La prestation musicale la plus spectaculaire de La Havane
Les mélodies du chanteur-compositeur Ray Fernandez sont, à n’en pas douter, le témoignage le plus crédible de la Cuba d’aujourd’hui. Les présentations de cet artiste au Diablo Tun Tun font partie des prestations musicales les plus spectaculaires de La Havane.
La trova est un genre qui marque de son sceau la musique cubaine et la singularise. Elle est reconnaissable grâce à la poésie des paroles, à la chronique qu’elle fait de notre société, et surtout à la présence indéfectible de la guitare.
De nombreux chanteurs-compositeurs cubains sont connus au niveau international, notamment Silvio Rodriguez et Pablo Milanés. Néanmoins, depuis quelques années, un interprète est devenu très populaire dans ce genre musical. Son nom : Ray Fernandez.
Au nombre de ses fans, le public cubain en général, mais aussi des visiteurs étrangers. Toutefois, il est surtout le favori des jeunes qui retrouvent dans les thèmes de ses chansons les conflits, les espoirs, les difficultés de la réalité cubaine des dernières années. Ce chanteur-compositeur a recours à l’ironie, au double sens et au ton performatif, ce qui le différencie de ses collègues contemporains.
Ce showman incarne l’archétype du bohème. Il a été surnommé le Toulouse-Lautrec de la trova cubaine actuelle,le Buster Keaton de la chanson intellectuelle. Un clown subversif du club des poètes éclairés.
Lorsque sa première composition (La Yuca) devint populaire, Ray n’était alors qu’un cuisinier passionné de musique. Pendant deux ans, il a parcouru, à l’aube, le malecón(avenue du bord de mer) de La Havane, en compagnie de sa guitare.
Il se présentait sans complexe devant n’importe quel inconnu et lui chantait sans préambule une ou deux de ses créations. Parfois, il n’hésitait pas, moyennant un pourboire, à interpréter les chansons qu’on lui réclamait.
Son premier disque Paciencia (Patience) sort en 2009, et dès lors, ses fans se retrouvent régulièrement au Diablo Tun Tun, le bar de la Maison de la musique de Miramar, pour la prestation musicale la plus spectaculaire de La Havane.
Plus de deux cents personnes se rassemblent dans un espace réduit, chaque jeudi, de 18 heures à 21 heures. Ray arrive, guitare en main, pour se lancer dans l’aventure, au risque de se montrer au-dessus de la moyenne et de marquer ainsi la différence.
Il parodie, improvise, a recours à des figures de rhétorique invraisemblables. Il passe du rock au son, au tango. Il parle en basque. Il enlève sa chemise et tape sur son ventre comme s’il s’agissait d’un tambour. Il porte des chapeaux mexicains et fait des satires politiques comme personne.
Ses chansons Bucanero, El gerente, Matarife ou El obrero ont fait de lui un chroniqueur social zélé. Il y critique le dirigeant arriviste, les bas salaires des Cubains et les prix élevés des marchandises dans les magasins.
Le trait distinctif de son répertoire est sans nul doute la sincérité de ses compositions, la vitalité avec laquelle il proclame la vérité, sans crainte. Avec une éloquence qui tient davantage du rapeur que du chanteur-compositeur, il polémique, argumente, explore au sein d’une société qui se réinvente jour après jour.
Marleidy Muñoz
Traduction : Alicia Beneito
Cubania