Aux personnes intéressées par l’art cubain. Libérez Luis Manuel Otero Alcántara

Dans l’après-midi du lundi 6 novembre 2017, les forces de police encadrées par la police politique ont mené une perquisition dans la maison de l’artiste Luis Manuel Otero Alcántara. L’artiste a été arrêté et une série de biens non encore spécifiés ont été retirés de sa maison. Cette action vise à bloquer l’organisation de la Biennale d’art indépendante de 2018 dirigée par Luis Manuel Otero Alcántara. L’initiative a été assumée par l’artiste après que les autorités culturelles et politiques du castrisme ont décidé de suspendre la convocation officielle de la Biennale et de la reporter à 2019 en prétextant les dévastations causées par le passage de l’ouragan Irma. Luis M. Otero Alcántara a développé un travail inspiré par la réalité de son pays et la mise en évidence de ses contradictions. Le Musée de la dissidence, un site internet qui décrit et étudie la dissidence politique au cours de l’histoire de Cuba, figure parmi ses réalisations. L’initiative a été développée par le créateur et chercheur Yanelys Núñez Leyva.

Ainsi que la performance « Où est Mella ? » (1), dans laquelle l’artiste critiquait l’absence de valeurs historiques autour de la construction et de la mise en service de l’hôtel Manzana Kempinski promues par les entreprises militaires et les investisseurs étrangers (2). Et encore la loterie « Avec tous et pour le bien de quelques-uns » organisée par Yanelis et l’artiste Nestor Siré pour permettre à un Cubain de séjourner à l’hôtel de luxe Manzana Kempinski et témoigner de son expérience. Toutes ces œuvres ont été conçus avec beaucoup d’ingéniosité.
Ce n’est pas la première fois que le gouvernement cubain suspend des événements culturels en utilisant comme argument les destructions provoquées par un cyclone. En 2004, le magnifique festival de rap de Rotilla, organisé depuis de nombreuses années et qui avait réalisé la plus grande mobilisation de son histoire, a été interdit. La raison en était le passage de l’ouragan Charley. Cette décision signifiait le déclin de l’événement. De nombreux rappeurs dénoncèrent alors le double discours officiel, qui interdisait une initiative du peuple cubain au motif de la souffrance causée par le cyclone, tout en maintenant les boîtes de nuit et les cabarets ouverts pour les touristes étrangers. (…) Dans cette longue période de déclin et de décadence, le gouvernement cubain a montré une abominable cohérence avec sa politique répressive. De la même manière, les institutions culturelles officielles ne sont pas là pour faciliter des actions artistiques, mais des outils de répression. Il y a quelques jours, une déclaration du comité exécutif de l’Association des artistes plasticiens de l’Union nationale des écrivains et artistes de Cuba (UNEAC) reliait l’initiative de Luis M. Otero Alcántara à des actions sans scrupules visant à une division abstraite, argument propre au discours politique officiel. Le procédé est connu, la dénonciation laisse le champ libre à l’intervention de la police politique et permet l’interdiction des initiatives indépendantes. Abel Prieto, ministre de la Culture, Miguel Barnet, président de l’UNEAC, et Lesvia Vent-Dumois, présidente de l’exécutif de l’Association des artistes plasticiens de l’UNEAC, sont coresponsables de ce qui arrive à Luis M. Otero Alcántara. Nous demandons la libération immédiate et sans inculpation de Luis Manuel Otero Alcántara, de même que la restitution de ses biens et la cessation de l’obstruction contre la réalisation de la Biennale indépendante organisée par un artiste dont Cuba devrait se sentir fière.

Des artistes cubains pour la libération
de Luis Manuel Otero Alcántara
(La Havane, le 7 novembre 2017)

Pétition publiée sur avaaz.org https://secure.avaaz.org/es/petition/Personas_interesadas_en_Arte_Cubano_LIBEREN_A_LUIS_MANUEL

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1. A Cuba, Julio Antonio Mella est toujours célébré aujourd’hui comme un géant du communisme, sans que l’on évoque jamais ses désaccords profonds ni a fortiori son exclusion du Parti communiste et sa mort suspecte. Et les archives des services secrets soviétiques restent désespérément closes sur ce sujet.

Voir à ce sujet : http://www.polemicacubana.fr/?p=12388

2. Le tourisme, secteur de pointe à Cuba, est aux mains d’entreprises gérées par les militaires et des investisseurs étrangers.


Enrique   |  Actualité, Culture, Politique, Solidarité   |  11 9th, 2017    |