Charles Bettelheim et la Révolution cubaine (1960-1971)
Cet article expose la vision de Charles Bettelheim à propos de la Révolution cubaine. Celui-ci engagea sa réflexion sur le processus révolutionnaire cubain dès 1960 et il fut conseiller des autorités cubaines jusqu’en 1968. Sa perception de la révolution cubaine subira au cours de ces années des modifications liées d’une part à l’évolution objective de la formation sociale cubaine issue de la révolution et d’autre part en raison des mutations de sa pensée théorique propre…
…Il est donc fait état ici des préconisations économico-politiques de Bettelheim sur le processus révolutionnaire cubain, du cheminement de son point de vue et des causes de la modification de celui-ci qui sont multiples et agissent en interaction. L’article présenté ici, se veut être un point de départ à une réflexion plus approfondie sur la pensée de cet auteur.
Introduction
Charles Bettelheim fut un économiste marxiste de la seconde moitié du XXème siècle. A défaut d’être un militant, au sens commun du terme, son œuvre et sa carrière universitaire ont été marquées par sa volonté de rompre avec le capitalisme et de construire une société nouvelle sur une base socialiste. Même s’il faisait partie des jeunesses communistes puis du Parti Communiste français au cours des années 1930, il en fut exclu en 1937, pour avoir exprimé des doutes et des aspects négatifs concernant le système soviétique suite à son séjour de plusieurs mois en URSS en 1936. Durant sa carrière universitaire commencée en 1939 par son intégration à l’Institut de Recherches Économiques et Sociales, il gardera des liens avec le PCF, tantôt avec des trotskistes et plus tard avec des groupes maoïstes, mais uniquement afin d’appui théorique et en gardant ses distances avec ces différentes organisations politiques.
Considéré parfois comme l’un des marxistes les plus en vue du monde capitaliste à son époque, son nom n’est toutefois guère cité dans l’histoire de la gauche française. Avec le déclin du marxisme à partir des années 1980 et le passage officiel à l’économie de marché des anciennes économies planifiées, l’œuvre de Bettelheim est tombée dans un oubli relatif. Depuis sa retraite universitaire à la fin des années 1980 et sa mort en juillet 2006, peu d’analyses de sa vie et de sa pensée ont surgi afin de tenter d’avoir une vision globale voire partielle de son œuvre.
Celle-ci peut être caractérisée par son amplitude dans le temps. En effet, de sa thèse écrite à la fin des années 1930 jusqu’au dernier volume des « luttes de classe en URSS » en 1982, sans compter les articles sur la Chine écrits en 1987-1988, quasiment cinquante années se sont passées. Ses objets d’études sont pluriels tout en restant dans le cadre de la théorie marxiste, mais on peut dire que les principaux sont : l’analyse de l’URSS et dans une moindre mesure de la Chine, la planification économique, les stratégies de développement et enfin la transition vers le socialisme. Ses ouvrages et articles peuvent porter aussi bien sur l’analyse d’un pays ou d’un aspect de celui-ci que sur une dimension théorique.
La pensée de Charles Bettelheim a été extrêmement mouvante tout au long de sa vie. Théoricien de la planification et des stratégies de développement à partir de sa thèse de troisième cycle en 1939, il en viendra en particulier dans les années 1960 à théoriser la loi de correspondance entre les rapports de production et le caractère des forces productives au moment où il s’intéressa plus particulièrement à la transition vers le socialisme. A partir de la fin des années 1960 et durant les années 1970, il réfutera ses thèses précédentes sur le primat des forces productives pour mettre progressivement en avant le rôle du Politique, de l’Idéologie et du Parti au cours de la période de transition au socialisme dans une perspective léniniste, appuyé par son engouement pour le Maoïsme et l’expérience révolutionnaire chinoise(1). Dans les années 1980, il réfutera à nouveau sa vision antérieure en nuançant le léninisme, et en démontrant dans le dernier volume des « Luttes de classes en URSS » que la Révolution Russe n’avait débouché que sur un capitalisme de « type nouveau » (Bettelheim, 1982) et que la prise du pouvoir par les Bolcheviks en 1917 n’avait été le fait que d’une intelligentsia qui a étouffé les aspirations de la population russe dans son ensemble.
Après plusieurs missions en tant qu’expert dans des pays cherchant à élaborer une planification économique (Égypte, Inde, Mali…), la Révolution cubaine de 1959 va l’intéresser tout particulièrement. Sur les conseils de Paul M. Sweezy, économiste marxiste américain, Ernesto Guevara l’invitera à venir dès 1960. Jusqu’en 1968 (date de son dernier rapport), il y conseilla les dirigeants politiques et économiques cubains sur la forme de la planification économique à adopter et sur les avancées de la révolution, par l’élaboration de rapports généraux ou détaillés ou par des cours donnés à l’université. Il se fera grandement remarquer lors du « Grand débat économique » des années 1963-1965, ou il s’opposera aux conceptions centralisatrices d’Ernesto Guevara, en proposant des solutions plutôt proches des éléments « soviétistes » du régime et des experts de l’URSS.
Durant tout le temps ou Charles Bettelheim s’est intéressé à la Révolution cubaine, son appréhension vis-à-vis de celle-ci a fortement évolué. D’un constat très favorable au début, en passant par des réserves modérées, il s’en détachera dès la fin des années 1960, moment au cours duquel ses critiques seront beaucoup plus sévères sur le déroulement de la Révolution
L’évolution du point de vue de Bettelheim concernant la Révolution cubaine peut être expliquée sous plusieurs angles différents bien qu’ils interagissent réciproquement. Quels sont-ils ? Et comment les expliquer ? Cela sera le fil conducteur de l’article : c’est-à-dire le rôle de Bettelheim à Cuba en tant qu’expert, mais principalement ses conseils et donc son opinion vis-à-vis de la Révolution et des tâches économiques et politiques à accomplir, ainsi que les causes de la modification de son point de vue.
I. Les activités de Bettelheim à Cuba (1960-1967) et son sentiment premier à propos de la Révolution
A. Les différentes étapes de l’implication de Charles Bettelheim pour la Révolution cubaine.
Sa carrière universitaire et d’expert économique international s’initie après la seconde guerre mondiale. Il fait partie entre autres de différentes missions pour le compte du Bureau International du Travail puis devient directeur d’étude à la VIème section de l’École Pratique des Hautes Études (EPHE) en 1948. C’est aussi au cours des années 1950 qu’il effectuera diverses missions d’expert en stratégie de développement et de planification dans différents pays notamment l’Égypte et l’Inde.
L’investissement de Charles Bettelheim pour la Révolution cubaine commence en 1960 où il réalise un voyage à titre privé (15 août-20 septembre), sur invitation du président de la Banque Nationale Cubaine, Ernesto Guevara. Ce dernier a été conseillé par les économistes marxistes américains Paul M. Sweezy et Léo Huberman. Bettelheim entretiendra d’ailleurs des rapports très cordiaux avec Guevara, malgré leurs divergences d’opinion sur la forme de la planification socialiste à mettre en œuvre (Cf. infra).(2)
Bettelheim revint en 1961 et en 1962 (du 5 juillet au 25 septembre) pour ce qui fut son plus long séjour sur l’île. Les suivant eurent lieu en 1963, 1964, 1965 et 1967. Il s’épaula durant ces différents séjours d’une équipe de collaborateurs, qui l’aidèrent et l’influencèrent sur son approche globale de l’économie et de la politique cubaine. Parmi eux, nous pouvons citer Issac Joshua et Michel Gutelman qui restèrent respectivement trois ans et quatre ans à Cuba(3).
Pour son dernier voyage, il fut invité par le président de la république cubaine, Oswaldo Dorticós. Son activité concrète correspondait en grande partie à sa participation à la réalisation des plans prospectifs de l’économie en collaboration avec la JUCEPLAN (Junta Central de Planificación) et à la tenue de conférences ou il exposait sa théorie de la planification.
Bien sûr, ces travaux et les notes qu’il écrivit sur la planification et plus globalement sur le processus de la Révolution cubaine, ne furent pas exempts de son point de vue et de conseils et critiques qui évoluèrent considérablement durant toute cette période.
B. L’enthousiasme premier de Bettelheim à propos de la Révolution cubaine
Charles Bettelheim effectue donc son premier séjour à Cuba au cours de l’été 1960. Il en retire au premier abord une impression très positive.
« Au cours des vingt mois écoulés, la Révolution a enregistré d’immenses succès sur les fronts économique et social. Les réalisations de cette période sont véritablement impressionnantes(…). Elles permettent de grands espoirs pour l’avenir du développement économique et social du pays et elles confirment que la voie dans laquelle celui-ci s’est engagé est fondamentalement juste. » (Bettelheim, 1960)
Bettelheim insiste également sur les possibilités extraordinaires qui s’offrent à l’économie cubaine, en particulier l’agriculture. Cette dynamique selon lui pousse à l’expansion rapide des forces productives. De là, il conseille diverses tactiques à adopter qui paraissent primordiales. D’une part, le maintien d’un taux de croissance élevé de la production nationale exigeait que l’expansion des forces productives soit qualitativement adaptée à l’expansion de la demande des consommateurs.
D’autre part, l’énorme potentialité de l’agriculture, malgré le legs du latifundisme, était à contrebalancer avec la faiblesse numérique de la population. Pour Bettelheim cela ne pouvait que prouver la nécessité de la planification. Cette accumulation agricole nécessitait selon lui peu de moyens financiers pour de grands résultats. Et de ce point de vue, il rejoignait les positions de René Dumont, agronome français qui conseilla également les dirigeants cubains au cours des années 1960. La planification était également nécessaire pour Bettelheim afin de veiller à conserver un équilibre entre les investissements des services publics sociaux et ceux du secteur productif. Il conseillait même d’élaborer au plus vite un plan quinquennal, dès que la JUCEPLAN serait opérationnelle(4). Il constatait déjà la faiblesse des statistiques économiques en 1961.
En 1960 et 1961, Charles Bettelheim n’était pas avare de compliments envers les dirigeants de la Révolution.
« 1961 est l’année de l’éducation, ainsi grâce à l’immense effort didactique des dirigeants de la Révolution et en premier lieu de Fidel Castro, pour expliquer aux masses la signification et la portée de tous les évènements auxquels elles participent ». (Bettelheim, 1961)
Il souligne également « le génie politique de Fidel Castro » à propos de la première réforme agraire de 1959, et l’importance de la transformation des rapports de propriété et des rapports de production et de l’expansion du secteur « socialiste ». Il est aussi très agréablement surpris par l’augmentation de la conscience des travailleurs, qui participent aux réunions, aux débats et qui devaient discuter et améliorer le projet de plan de la JUCEPLAN de 1962-1965.
II. De l’enthousiasme à la réalité
A. Les premières réserves et critiques de Bettelheim (1962-1965)
Cette période de la Révolution cubaine est vue par Charles Bettelheim comme très importante car devant mettre en place une ligne politique et économique claire et efficace. Son attachement à la Révolution cubaine est toujours intact. Il indique en 1962 les points positifs de la situation cubaine. D’une part, il met en avant l’augmentation de la production industrielle et agricole bien qu’elle soit calculée en prix courants. Les normes et la préparation du plan se font de façon plus satisfaisante. Egalement, l’information statistique s’améliore un peu.
Mais durant ce séjour en 1962, il fait ressortir de nombreux aspects négatifs de la situation (Bettelheim, 1962). Il constate entre autres un ralentissement marqué de la croissance du revenu réel, que le fonctionnement qualitatif de l’industrie, du commerce et de l’agriculture n’a fait que des progrès très modestes ce qui compromet l’avenir des plans d’accumulation et de reproduction élargie. La détérioration de la situation monétaire est déjà en marche et liée aux pénuries et à des déficits financiers continus et importants. La montée du bureaucratisme l’inquiète aussi. Selon lui, elle se manifeste par la croissance du nombre des administrateurs et des organismes d’état, du nombre de fonctionnaires et des formalités et par un éparpillement croissant et dangereux des responsabilités.
« Personnellement, je pense que tant que ce travail politique n’aura pas été accompli, on assistera nécessairement à des flottements, à des hésitations, à des mouvements en sens contraire qui non seulement sont une source objective de paralysie, mais qui surtout ont des effets subjectivement décourageants et poussent au bureaucratisme, à l’inertie, à l’attente de nouveaux ordres venant d’en haut ». (Bettelheim, 1962)
Le tableau qu’il dresse dans ses rapports de 1963 est sensiblement le même. La situation en 1963 est caractérisée :
- Par l’absence de progrès économique d’ensemble, ceci depuis 1961.
- Par le caractère irréaliste des plans, qui traduit une absence de contrôle réel sur l’économie de la part des organes centraux de planification et de gestion économique.
- Par la dégradation progressive des instruments de calcul économique. Cette dégradation est liée à une sous-estimation de l’importance des problèmes de rentabilité économique.
Comme en 1962, il insiste sur les problèmes des prix et des salaires qui pour lui doivent être profondément restructurés, en raison en particulier d’un grand manque de lien entre la variation de la productivité du travail et l’augmentation des salaires.
Au niveau de l’incohérence des plans Bettelheim affirme :
« Je crois qu’il faut dire franchement que de tels plans ne correspondent nullement aux exigences de la planification socialiste. Au lieu d’aider au développement des forces productives, ils sont une source d’incohérence (…) et de gaspillage économique ». (Bettelheim, 1963)
Le développement de la bureaucratie est un fait non négligeable à son avis, mêlé à l’organisation verticale et hiérarchique de l’économie. « La conscience de la réalité économique est une conscience administrative, bureaucratique, mystifiée et mystificatrice »(Bettelheim, 1963). Il souligne l’absence d’un parti dirigeant fortement structuré et armé sur le plan idéologique, de l’application d’un véritable centralisme bureaucratique et l’absence d’organes de pouvoir populaire dotés de pouvoir effectif de décision.
Les faits et préconisations notés par Bettelheim au cours des années 1964 et 1965 sont quasi identiques aux deux années précédentes, preuve que les faits ont peu évolué au cours de ces années.
Une remarque à faire est la différence de ton qui caractérise les rapports de Bettelheim à destination des autorités cubaines, où les problèmes sont légitimement abordés, et les articles et textes de conférence que celui-ci réalise pour le public français, très élogieux. Rappelons que Bettelheim fut président de l’association France-Cuba de 1962 à 1971. Par exemple, il écrit en 1964 lors d’une conférence en France :
« Ce qui frappe le plus chaque fois que l’on revient à Cuba, c’est l’atmosphère de liberté, de courage et d’enthousiasme qui caractérise ce pays depuis la révolution ». (Bettelheim, 1964)
Bettelheim, même s’il pointe des dysfonctionnements importants, reste admiratif des progrès réalisés lors des premières années de la révolution, bien qu’il essaie par sa voix de faire en sorte que les autorités prennent en compte des préconisations pour que la situation économique et politique s’améliore afin de poursuivre la construction du socialisme.
B. L’analyse de Bettelheim sur Cuba durant cette période en rapport avec sa théorie d’ensemble sur la phase de transition vers le socialisme.
Pour Bettelheim, l’évolution vers « la vie quotidienne » est inévitable, c’est-à-dire le retour à une certaine « routine sociale » marquée par exemple par le moindre investissement de la population dans les affaires publiques, mais elle est aggravée par les difficultés objectives de la situation:
« Qui ont conduit à pousser la socialisation des moyens de production et de distribution au-delà des limites qui correspondent au niveau de développement des forces productives et aux capacités de gestion et d’administration efficiente de la production et de la circulation ». (Bettelheim, 1962)
Ici, l’on retrouve les thèses et théories exposées par Charles Bettelheim durant cette période et qu’il reprendra au cours du grand débat économique contre les thèses de Guevara et de Mandel notamment (Cf. Encadré). Il tiendra d’ailleurs une conférence à l’université de La Havane en 1963 où il exposa clairement son point de vue(5).
En effet, pour lui c’est le développement des forces productives qui va permettre celui des rapports de production. Cuba étant en train de commencer seulement sa phase de transition vers le socialisme, sur une base technique relativement faible, de nombreux éléments marchands ne devaient pas être supprimés trop rapidement. Par exemple au niveau des stimulants matériels, qui selon Bettelheim devaient conserver un rôle important et qui furent particulièrement négligés.
« Mais, refuser aujourd’hui d’élargir ce rôle (celui des stimulants matériels) alors que l’on commence seulement la construction du socialisme me paraît être une erreur pleine de dangers et résulter d’une conception idéaliste de ce problème ».
Il ajoute :
« Les modes de distribution du produit social ne peuvent être conçus indépendamment du niveau de développement des forces productives ».
Il en va de même au niveau de l’autonomie financière et comptable des entreprises, qui d’après Bettelheim devrait à ce stade de développement être favorisée, ajoutée à des intéressements particuliers aux résultats quantitatifs et qualitatifs pour les ouvriers, les techniciens, les cadres…. Il y voyait un moyen pour remédier à la faible croissance de la productivité, et aux négligences vis à vis du matériel de production, comportement très vivace à cette période.
Toujours selon son schéma théorique de cette période, il prédisait un rôle important pour l’agriculture privée, qui ne devait pas être négligée(6).
« Ce n’est que peu à peu que la situation se modifiera. En attendant, il me paraît soit irrationnel soit dangereux d’alourdir les tâches de l’INRA (Institut National de la Réforme Agraire), en favorisant une nouvelle extension rapide et ample du secteur socialiste. Ceci ne conduirait qu’à aggraver les tendances à la bureaucratie et à l’inefficience ». (Bettelheim, 1962)
Il préconisait un accroissement de la production et de l’efficience du secteur agricole socialiste au lieu de son extension au détriment de l’agriculture privée. Nous savons que ceci ne sera pas appliqué car dès 1963, la seconde réforme agraire conduira à l’expropriation des moyennes et grandes exploitations agricoles privées par le secteur d’état.
Ces remarques de Bettelheim seront encore accentuées à partir de 1966, période caractérisée par la mise en place de plans spéciaux pour l’économie, par la suppression progressive des stimulants matériels et des normes de travail, et par la nationalisation des petites unités artisanales et commerciales existantes.
A cet effet, il met en avant en 1967, le fait que les dirigeants et les cadres négligent le calcul économique et les stimulants matériels. Il fustige également les plans spéciaux de l’économie mis en place :
« Le système des projets spéciaux peut être un facteur de désorganisation dans le reste de l’économie et, en fait, l’est souvent ». (Bettelheim, 1967)
Les changements survenus depuis 1966 accentuent selon lui les problèmes qu’il soulevait les années précédentes, par une centralisation trop élevée qui ne correspond pas à des exigences objectives et aux besoins effectifs du développement dans le sens du socialisme. Il pointe aussi le manque de diffusion et d’information des documents économiques à tous les niveaux, ce qui correspond à une culture du secret, négative pour la construction du socialisme
Le grand débat économique cubain (1963-1965)
Un fait manifeste à Cuba au début de la Révolution, était le manque d’expérience des nouveaux dirigeants cubains concernant la politique économique socialiste, d’où l’appel à contribution de nombreux experts étrangers pour conseiller les premières perspectives de plans économiques. C’est à partir de 1963, que deux courants opposés vont voir le jour publiquement et commencer un débat d’opinion important par l’intermédiaire essentiellement de revues théoriques(7). Ce débat portait sur le type ou plutôt le degré de planification économique à adopter et plus spécifiquement sur l’utilisation de la loi de la valeur au sein du secteur nationalisé et donc sur l’utilisation de stimulants matériels pour les travailleurs dans la période de transition.
Le premier courant était porté notamment par Carlos Rafael Rodríguez, ancien du PSP (Parti Socialiste Populaire), et appuyé par Charles Bettelheim qui fut un acteur important de ce débat. Les idées défendues sont celles qui ont cours à ce moment précis en URSS et qui seront approfondies par les réformes économiques de 1965. L’accent est mis sur le faible niveau des forces productives à Cuba et l’importance que doit continuer à avoir la loi de la valeur et les catégories marchandes dans l’économie. Ils mettent en avant l’exigence de la loi de correspondance entre les rapports de production et le caractère des forces productives. « La nature des rapports de production est donc déterminée par les forces productives elle mêmes et par leur degré de développement » (Bettelheim, 1968). Des rapports de production socialistes c’est-à-dire débarrassés des éléments marchands (stimulants matériels, production privée, calcul économique dans le secteur socialiste, autonomie financière des unités économiques…) pourront s’affirmer et être effectifs seulement lorsque les forces productives auront atteint un certain niveau correspondant à une socialisation effective des moyens de production qui implique, notamment, la capacité effective de la société de comptabiliser et de répartir par un calcul en temps de travail nécessaire, à défaut d’entraver le développement de l’accumulation socialiste. C’est pour cela que les tenants de ce courant conseilleront l’utilisation des stimulants matériels (primes…) pour les travailleurs et la mise en place d’une autonomie financière des entreprises afin qu’elles soient toujours en partie guidées par la rentabilité en raison de l’état des forces productives cubaines au début de la révolution.
L’autre courant dont la figure emblématique fut Ernesto Guevara fut également très actif, et relayé par le penseur marxiste belge Ernest Mandel. Guevara proposait que les stimulants matériels aient la plus petite place possible dans l’économie, et qu’il y ait une prédominance des stimulants moraux au sein des entreprises. Car pour lui, les stimulants matériels, hérités du capitalisme ne pouvaient pas être appliqués et avoir force de loi si l’on voulait construire le socialisme, car au contraire cela conduirait à reproduire la conscience capitaliste (de l’appât du gain) et serait une entrave à la construction du socialisme. L’éducation des masses dans le sens du désintérêt matériel devait avoir une grande importance. « Les tares de l’ancienne société se perpétuent dans la conscience individuelle et il faut faire un travail incessant pour les faire disparaître». (Guevara in Lowy, 1987)
Cette vision de Guevara fait partie d’une représentation plus générale sur la planification et sur la transition vers le socialisme. Il faut voir que celui-ci souhaite se débarrasser le plus vite possible des tares du capitalisme et rejette la loi de la valeur comme loi économique de la période de transition. Comme nous l’avons vu, pour lui, les stimulants moraux sont capables d’accroître les forces productives, c’est à dire que le développement de la conscience socialiste permettrait en partie l’accroissement de la productivité du travail. Evidemment, Guevara rejette le lien mécanique entre rapport de production et caractère des forces productives. Pendant un certain temps, Guevara fut donc responsable du ministère de l’industrie, Carlos Rafael Rodríguez, ministre de l’INRA (Institut National de la Réforme Agraire) et Alberto Mora ministre du commerce extérieur. Il en résulta que deux types de planification furent appliqués. Le SBF (Système Budgétaire de financement) dans l’industrie et un système budgétaire étatique modifié dans l’agriculture avec une plus grande utilisation de la loi de la valeur (Leleu, 2010).
III. La rupture de Bettelheim vis-à-vis de la Révolution cubaine
A. L’analyse de Charles Bettelheim sur Cuba renouvelée (1968-1971)
Si l’on considère les ouvrages et travaux publiés après 1965 par Bettelheim, l’on perçoit clairement un discours moins mécanique quant à l’articulation entre les rapports de production et le caractère des forces productives. Bien qu’il admette qu’il reste une « base objective » du comportement des sociétés antérieures dans la société de transition tant que le niveau de développement des forces productives n’est pas suffisamment élevé, il donne un rôle beaucoup plus important à l’éducation, à l’idéologie et à la pénétration du marxisme- léninisme au sein des masses.
« C’est pourquoi tout au long de la période de transition la voie effectivement suivie par la formation sociale dépend des rapports sociaux dominants aux niveaux idéologiques et politiques. Selon que ces rapports permettent ou non l’unification croissante des procès de production et la maîtrise des producteurs sur l’ensemble de ces procès, la formation sociale évolue vers le socialisme ou prend la voie capitaliste » (Bettelheim, 1968).
Son travail, non publié, sur les étapes de la révolution cubaine, est très intéressant sur l’évolution de sa réflexion théorique générale, et sa nouvelle analyse de Cuba en découlant. Lui qui voyait l’URSS comme un certain exemple, non exempt de critiques, sur le plan des réalisations économiques, commence à la rejeter, en tant que système politique, mettant en avant un révisionnisme marxiste, un dogmatisme et un « économisme » dont il fut l’un des partisans et théoriciens et qu’il commence à critiquer farouchement à partir de ce moment là.
Pour ce qui concerne la Révolution cubaine, il ne la considère plus comme ayant débouché sur une formation sociale en transition vers le socialisme, en raison de la couche dirigeante qui est très éloignée du socialisme, par son idéologie et sa pratique.
« L’idéologie dominante au niveau de la direction de la révolution n’est pas le marxisme-léninisme. En fait, ce qui domine c’est une idéologie « humaniste » qui met en avant les thèmes idéalistes de la « morale » petite-bourgeoise et de la justice abstraite ».
Bettelheim voit comme le facteur fondamental qui conduit vers telle ou telle formation sociale, le résultat de la lutte de classe, et donc du rôle des masses et de la pénétration du marxisme-léninisme au sein de celles-ci pour effectivement conduire vers le socialisme. L’important, devient l’évolution des rapports de production, qui selon Bettelheim et contrairement à sa théorie antérieure, peuvent guider le développement des forces productives.
Toujours pour ce qui est de Cuba :
« On met en avant non le rôle des masses mais celui de la direction de la Révolution incarnée par son dirigeant suprême. On tend ainsi, objectivement, et quoi qu’on puisse dire par ailleurs, à réduire l’initiative de la base au profit d’une direction centrale. C’est là un des effets de l’idéologie dominante qui est l’idéologie petite bourgeoise de l’humanisme ».
Bettelheim qualifie donc la couche bureaucratique dominante à Cuba comme issue de la petite bourgeoisie et ayant une idéologie et une pratique issues de cette tendance, et qui par les discours, bien que faisant référence au marxisme-léninisme, s’en éloigne sur bien des points. Discutant sur la construction du socialisme par articles interposés avec Paul Sweezy, Bettelheim revient sur l’obnubilation des dirigeants cubains à vouloir supprimer les catégories marchandes de l’économie le plus rapidement possible.
« Si cette dernière (la direction cubaine) attache une telle « importance » au problème des rapports marchands, au point d’en faire le « centre » de sa conception idéologique et de sa pratique politique, cela ne peut être seulement la conséquence d’une erreur subjective. Je dirai que c’est là l’effet d’une idéologie et d’une politique qui concentrent tout le pouvoir entre les mains d’un groupe dirigeant, et qui ne créent donc pas les conditions nécessaires à l’exercice démocratique du pouvoir prolétarien (ni les conditions idéologiques, ni les conditions d’organisation, ni les conditions politiques). (…) Cette pratique politique a une signification de classe (…) dont je dirais qu’elle est liée à la domination politique d’une fraction « radicalisée » de la petite bourgeoisie » (Bettelheim, 1971).
B. Les explications concernant la modification de la vision de Bettelheim sur la Révolution cubaine.
Charles Bettelheim, marxiste enthousiaste des débuts de la Révolution cubaine et des réalisations de celles-ci, termina donc son expertise officielle pour les autorités cubaine et ses rapports(8) sur des notes particulièrement négatives, et cela, nous pensons pour plusieurs raisons essentielles qui ont agi, de fait, en interaction.
Tout d’abord, l’évolution objective de la Révolution cubaine joua un rôle dans le sens de son éloignement. A travers son schéma théorique sur la construction du socialisme qu’il défend à peu près jusqu’en 1966-1967, il essaie, par ses rapports et les critiques qu’ils contiennent, d’influencer la politique économique cubaine vers des réformes conformes à la loi de correspondance entre les rapports de production et le caractère des forces productives, c’est-à-dire de ne pas trop développer de façon extensive le secteur « socialiste », ou d’utiliser de façon efficace les stimulants matériels.
Or, il n’en fut rien, et malgré le grand débat économique, et des tâtonnements concernant la planification économique en général et son organisation, la direction cubaine se lancera dans une voie contraire en voulant construire le communisme le plus vite possible en renonçant aux catégories marchandes. Le soutien d’une grande partie de la population cubaine et sa participation active à la Révolution avaient séduit Charles Bettelheim lors de son premier séjour, mais nous avons vu que dès 1962, celui-ci percevait déjà des faiblesses au niveau de la participation des masses au processus de décision et l’ancrage d’une bureaucratie. Ces faits ont forcément fait bouger la perception générale de Bettelheim sur la Révolution.
Durant cette première période, malgré ses critiques, Bettelheim continue à considérer Cuba comme un pays en transition vers le socialisme. Mais à partir essentiellement de 1968, son discours changea radicalement. Bettelheim, que l’on aurait pu auparavant qualifier d’« économiciste », accentua son discours en mettant en avant le facteur politique, en l’occurrence la lutte des classes comme condition de la construction du socialisme c’est-à-dire l’émergence de nouveaux rapports sociaux.
« La transformation socialiste des rapports de production résulte toujours de la lutte de classe et avant tout de la lutte idéologique et politique de classe menée à l’échelle de la formation sociale» (Bettelheim, 1975).
Ceci le mène finalement à ne plus considérer Cuba comme une formation sociale en transition du capitalisme au socialisme en raison des rapports sociaux en vigueur dans le pays caractérisés par la direction verticale de l’économie, par la prégnance du parti dirigeant, l’idéologie et la pratique qu’il véhicule et par la faiblesse des organisations de masse. Cette nouvelle vision de Bettelheim s’inscrit également dans son expérience de la révolution chinoise(9), de son nouvel engouement pour le maoïsme, et par le lancement récent à cette époque de la révolution culturelle.
Son rejet de l’ « économisme » ne vient pas seulement de l’expérience cubaine et chinoise mais également des débats qui ont cours en France au sein de la sphère marxiste. En particulier, l’influence de Louis Althusser dont il fut proche, fut importante sur le plan théorique. Les enseignements théoriques et pratiques des personnes ayant assisté Bettelheim durant ses séjours à Cuba et qui effectuèrent des rapports très précis eurent surement une portée sur la nouvelle vision de Bettelheim sur Cuba.
« Ceux-ci (Isaac Joshua et Michel Gutelman) vivaient toute l’année à Cuba, s’y sont fait des amis dans des couches très diverses de la population. Ils savent également comment se déroulent les travaux dans les ministères et les unités de production. Ils observent les changements qui s’opèrent dans les différents groupes sociaux notamment les variations dans leur degré d’enthousiasme et de déception » (Bettelheim, 1997).
Il est donc facile de comprendre ici la rupture de Bettelheim vis-à-vis de la Révolution cubaine qui survient finalement sur le plan pratique, par une certaine résignation quant au cours pris par la révolution et sur le plan théorique. Il effectuera ensuite les mêmes critiques sur la formation sociale soviétique(10) et dans son œuvre « Les luttes de classes en URSS », il y verra un État dominé par une nouvelle bourgeoisie.
Conclusion
Les huit années au cours desquelles Charles Bettelheim fit office d’expert de la planification économique pour les autorités et la Révolution cubaine furent extrêmement enrichissantes au point de vue théorique et pour une relative compréhension du déroulement de la révolution au niveau tant économique que politique.
Ce qui ressort ici de cet exposé est le fait que Bettelheim, malgré son insistance à pousser à des changements d’organisation de la planification économique, ne fut que très peu écouté par les autorités cubaines, que ce soit sur le développement d’une planification plus développée (plan quinquennal, planification prospective) qu’il proposait, sur le développement de statistiques économiques de meilleure qualité, sur une refonte du système des prix et des salaires ou sur l’enthousiasme des masses par exemple.
D’autres experts, tel René Dumont, agronome français qui conseilla également les autorités cubaines, eurent peu d’influence sur le cours de la politique économique cubaine. Ce dernier, par exemple, insistait sur l’importance de la forme coopérative de production dans le secteur agricole. « Ces avertissements, de même que ceux, très semblables de René Dumont, ne servent à rien » (Bettelheim, 1997). René Dumont, fut même accusé par les dirigeants cubains d’être un agent de la CIA en raison de ses critiques durant « l’affaire Padilla ».
Nous pouvons penser que « l’expérience cubaine » de Charles Bettelheim a eu une influence théorique importante sur l’évolution de sa pensée économico-politique bien que ce ne soit pas le seul élément qui conduisit à sa rupture théorique de 1967-1968. En effet, son éloignement de la Révolution cubaine, tient, comme nous l’avons dit, de l’évolution objective des rapports sociaux de la formation sociale cubaine qui façonna sa nouvelle posture théorique que nous voyons ressortir à partir de 1968 ainsi que son étude du processus à l’œuvre en Chine et des débats au sein de la sphère idéologique marxiste de l’époque , et qui l’amène à démontrer que la formation sociale cubaine, n’est pas ou n’est plus, par ses rapports sociaux, ses rapports de classes existants, en transition vers le socialisme.
Jérôme Leleu
Notes de fin
(1) Bettelheim expliqua clairement la modification de sa pensée à ce moment là dans l’avant propos des luttes de classes en URSS 1ère période, 1917-1923. Il y attaque assez longuement « l’économisme ». Cf. (Bettelheim, 1974)
(2) Les correspondances sous forme de lettres sont disponibles dans les archives de Charles Bettelheim (EHESS) et ont été reproduites dans un article biographique sur Charles Bettelheim (Denord et Zunigo, 2005)
(3) De 1964 à 1967 pour Isaac Joshua et de 1963 à 1967 pour Michel Gutelman
(4) Nous savons que le premier plan quinquennal ne fut élaboré à Cuba qu’en 1976.
(5) Le texte de cette conférence a été reproduit dans l’ouvrage « planification et croissance accélérée ». Le titre du chapitre est « loi de la valeur et construction du socialisme », Cf. (Bettelheim, 1975).
(6) Ceci avant la seconde réforme agraire de 1963.
(7) Cuba Socialista et Nueva Industria.
(8) Son dernier rapport est en fait une lettre envoyée au président de la République de Cuba, Oswaldo Dorticós datée du 22 avril 1968.
(9) On ressent déjà les prémices de son déplacement théorique dans un ouvrage écrit après un séjour en Chine. Cf. (Bettelheim, 1965).
(10) En rapport avec l’affaire Padilla par exemple, il écrira un article dans le journal Le Monde du 2 mai 1971 intitulé « La révolution cubaine sur la voie soviétique ».
Bibliographie
Documents disponibles dans les archives de Charles Bettelheim à l’EHESS, 105 Boulevard Raspail, Paris (Sous la responsabilité de Bernard Chavance) :
- Mémorandum sur la planification économique à Cuba, 19 septembre 1960, 43 p. AP/5 (1960-1962).
- Cuba, année de l’éducation, Août-septembre 1961, 20 p. dact. (double) (en français), AP/5 (1960-1962).
- Rapport sur quelques problèmes actuels de l’économie cubaine, Août 1962, 109 p. dact. AP/5 (1960-1962).
- Rapport définitif, octobre 1962, 50 p. dact. AP/5 (1960-1962).
- Cuba 1962, 5 p. dact. Cuba si, n° 4, 1962, p. 10-13. AP/5 (1960-1962).
- Reunión con el profesor Bettelheim, celebrada el sábado primero de septiembre de 1962, en el palacio presidencial, 32 p. ronéot. AP/5 (1960-1962).
- Cuba et sa révolution, 26 avril 1963, 33 p. [conférence pour Bruxelles et Liège], AP/6 (1963-1965).
- Construction du socialisme, organisation et stratégie économique, 12 septembre 1963, 64 p. dact. AP/6 (1963-1965).
- Rapport provisoire sur quelques problèmes économiques cubains, 27 août 1963, 49 p. dact. AP/6 (1963-1965).
- Cuba, An VI de la révolution, 26 février 1964, 32 p. dact. (double) [conférence à Lyon, 13.3.1964], AP/6 (1963-1964).
- Situation et problèmes économiques de Cuba en 1964, 5 août 1964, 78 p. dact. AP/6 (1963-1965).
- Problème du développement perspectif de l’économie cubaine, 2 novembre 1965, 26 p. dact. AP/6 (1963-1965)
- 1965, année de l’agriculture, 28 avril 1965, 8 p. dact. (double) [article pour Cuba si], AP/6 (1963-1965).
- Note générale, 10 octobre 1967, 43 p. dact. AP/7 (1966-1971).
- Sur les étapes de la révolution cubaine, 18 mars 1968, 157 p. dact. AP/7 (1966-1971)
- Lettre de Charles Bettelheim à Sr Oswaldo Dorticós, La Havane, 22.4.1968, 7 p. dact. AP/7 (1966-1971).
- Note concernant l’affaire Padilla, 2 mai 1971, 6 p. dact. AP/7 (1966-1971), (sera publié dans Le Monde sous le titre « la révolution cubaine sur la voie soviétique »).
- Mémoires, Version définitive, 1997, AP/29.
Autres sources :
Bettelheim, Charles, Marchisio, Hélène, Charrière, Jacques (1965). La construction du socialisme en Chine. Paris : Maspero.
Bettelheim, Charles (1968). « Formes et méthodes de la planification socialiste et niveau de développement des forces productives » in La transition vers l’économie socialiste. Paris : Maspero.
Sweezy P, Bettelheim C (1971). Lettres sur quelques problèmes actuels du socialisme. Paris : Petite collection Maspero.
Bettelheim, Charles (1974). Les luttes de classes en URSS 1ère période, 1917-1923. Paris : Seuil/Maspero.
Bettelheim, Charles (1975), Planification et croissance accélérée. Paris : Petite collection Maspero.
Bettelheim, Charles (1975). Révolution culturelle et organisation industrielle en Chine. Paris : Maspero.
Bettelheim, Charles (1982). Les luttes de classes en URSS – 3ème période Tome 1 : les dominés. Paris : Seuil/Maspero.
Denord François, Zunigo Xavier. « Révolutionnairement vôtre : Économie marxiste, militantisme intellectuel et expertise politique chez Charles Bettelheim », Actes de la recherche en sciences sociales 2005/3, 158, p. 8-29.
Guevara, Ernesto (1987). « Le socialisme et l’Homme à Cuba ». Dans LOWY, Michael. Ernesto Guevara: écrits d’un révolutionnaire. Paris : Ed. La Brèche.
Pour citer cet article :
Leleu Jérôme, « Charles Bettelheim et la Révolution cubaine (1960-1971) », RITA, N°6 : février 2013, (en ligne), mis en ligne le 28 février 2013. Disponible en ligne http://www.revue-rita.com/notes-de-recherche6/jerome-leleu.html