Raúl Castro, Cuba et la liberté
Raúl Castro a été élu président du Cuba le 24 février 2008, succédant ainsi à son frère Fidel Castro. Avant cela, il occupait déjà, depuis 1976, le poste de vice-président des Conseils d’État et des ministres et était en charge du ministère des Forces armées révolutionnaires. Depuis 2011, il occupe aussi le poste de Premier secrétaire du Parti communiste cubain. Il a été réélu président en 2013.
Néanmoins, ce devrait être le dernier mandat de Raúl Castro, âgé de 83 ans. Il affirmait en en 2013 que ce serait son dernier mandat en prônant un transfert en douceur et ordonné des charges du pouvoir aux nouvelles générations. Son successeur désigné, nommé premier vice-président du Conseil en 2013, est d’ailleurs un « jeune » quinquagénaire : l’ex-ministre de l’éducation supérieure, Miguel Diaz-Canel.
Cuba possède les attributs d’une « démocratie participative », mais les élections n’ont aucun enjeu, les candidats sont tous membres du Parti communiste cubain, aucun opposant ne peut se présenter. C’est un exercice de la démocratie sans pluralisme.
Aux élections de 2008, 96 % de la population en âge de voter s’était rendue aux urnes. En 2013, 91,27%. Voter est un rituel, une habitude sociale. Le rôle des Comités de défenses de la révolution est toujours de surveiller et de contrôler la population, et de dénoncer d’éventuels dissidents.
Avec l’arrivée au pouvoir de Raúl Castro, Cuba a pourtant signé les deux pactes des Nations unies relatifs aux droits civils et politiques, ainsi qu’aux droits économiques, sociaux et culturels, témoignant d’une volonté de se conformer au droit international. Mais sans les ratifier.
Si l’accession de Raúl Castro à la tête du pays avait suscité des espoirs en termes d’ouverture, ils ont été contredits par le renforcement de la répression depuis 2011. Bien sûr, le récent dégel s’est accompagné de progrès dans le domaine des droits de l’homme, avec notamment la libération de 53 prisonniers politiques en janvier 2015.
On n’envoie plus en prison, comme auparavant, des dissidents pour 10 ou 15 ans. En revanche, la pression sur les opposants s’accentue, ils sont harcelés, arrêtés et interrogés plusieurs fois par mois. En 2014, il y avait en moyenne 700 arrestations de courte durée par mois. En mars 2015, il y en a eu plus de 600. Sur le plan des libertés d’expression, de réunion et d’association, rien n’a évolué, le système répressif reste le même : pas de presse ni de syndicats indépendants, aucune association possible hors des structures officielles.
Un autre point positif récent : la réforme migratoire de 2013 et l’abrogation de la tarjeta blanca. Cette « carte blanche », “nécessaire à toute sortie du pays”, qui était couramment refusée aux dissidents et opposants politiques.
La situation de la liberté de l’information demeure extrêmement problématique à Cuba, où seuls les médias officiels sont autorisés : une télévision, une radio, deux quotidiens (Granma et Juventud Rebelde) et leurs déclinaisons locales, qui servent avant tout à relayer la propagande du régime. La répression à l’encontre de ceux véhiculant des idées critiques à l’encontre du régime se poursuit, sous la forme de détentions arbitraires ou encore de menaces. L’utilisation d’Internet reste étroitement contrôlée.
Les journalistes et blogueurs cherchant à informer de façon indépendante sont toujours condamnés à diffuser leur production de l’information à partir de supports extérieurs, une réglementation draconienne existe pour les médias étrangers. Une clause établit notamment qu’un journaliste étranger dont le traitement de l’actualité serait jugé « trop négatif » par le régime encourt une expulsion immédiate.
Raúl Castro est celui qui, dès la prise du pouvoir, en janvier 1959, fit, le premier, fusiller des dizaines de prisonniers en une seule nuit à Santiago de Cuba après un « procès » inique de moins d’une demi-heure. Tout au long de son mandat à la tête des Forces armées et de la répression interne, il fit exécuter, emprisonner, et pousse à l’exil des dizaines de milliers d’opposants, d’accord avec son frère et Che Guevara, par le biais des tristement célèbres « tribunaux révolutionnaires » et autres juridictions militaires, toujours en activité.
Il en fut ainsi lorsque le gouvernement décida de se débarrasser de potentiels rivaux, comme lors du « procès Ochoa » en 1989, lorsque des officiers supérieurs furent passés par les armes, ou quand des jeunes voulant abandonner le pays furent condamnés à mort en 2003, lors du « printemps noir », après une parodie de procès.
La peine de mort est toujours en application à Cuba. Néanmoins le régime a commencé en 2008 à commuer les peines de mort des quelque 50 condamnés des couloirs de la mort en des condamnations de prison.
Cuba n’a donc plus aucun condamné à mort dans ses prisons. Et le pays n’a pas procédé à une exécution capitale depuis avril 2003. Trois hommes avaient alors été fusillés pour avoir pris en otages 50 personnes dans une embarcation, et menacé l’équipage de leurs armes. Ils souhaitaient prendre la mer pour Miami.
Enrique Roig San Martin