Les années 1960 : les Beatles et les Stones censurés
A contre courant du reste du monde, les sixties, à Cuba, ne sont pas, loin s’en faut, des années de libération des moeurs. La culture hippie n’a aucune chance de s’y épanouir. Au contraire, la répression s’abat contre tous les “déviants”, sexuels ou idéologiques dont l’ardeur révolutionnaire paraît insuffisante. Des milliers d’homosexuels et de lesbiennes, des jeunes hippies (ou considérés comme tels parce qu’ils paraissent efféminés), des artistes, et des religieux sont enfermés dans les Unités militaires d’aide à la production (UMAP), ces camps de concentration de sinistre mémoire.
Au plus fort de la contre-culture hippie, dans les années 60, les Beatles et les Stonesétaient interdits à Cuba, considérés comme des artistes dégénérés.
“On voit par là que le gouvernement, prétendument progressiste, est profondément imprégné des valeurs machistes et des préjugés homophobes propres aux petits-bourgeois”, relève l’exilé Pio Serrano, qui, à l’époque, croyait encore à la Révolution. “Les années 1960 furent terribles, poursuit-il. Des purges homophobes étaient organisées à l’Université de La Havane où j’enseignais la philosophie. Je n’y ai pas participé mais je me suis tu. Sur la Rampa, une avenue de la capitale où se retrouvait la jeunesse, des policiers armées de ciseaux réalisaient des descentes. Ils coupaient les cheveux des garçons qui les portaient trop long et découpaient leurs pantalons à pattes d’éléphants, signe de “décadence capitaliste”. Quant aux jeunes femmes vêtues de mini-jupes, elles étaient embarquées au poste de police et, parfois, internées dans des UMAP.”
Les Beatles et les Stones, considérés comme des artistes dégénérés, étaient interdits. “Ma première femme, une militante de gauche américaine, nous avait ramené des Etats-Unis l’album Sergeant Pepper’s Lonely Heart Club Band. Nous l’écoutions clandestinement à la maison, mais à très faible volume. C’est pourquoi les gens de ma génération ont été indignés lorsque Fidel Castro, longtemps après, a inauguré un parc John Lennon à La Havane. Mais c’est cela, la double morale castriste…”