Vers la fin de l’embargo à Cuba

L’Assemblée générale de l’ONU (AG) a massivement adopté le 13 novembre une résolution condamnant l’embargo américain sur le Cuba, exhortant Washington à mettre fin à son embargo de longue durée contre le pays insulaire des Caraïbes. La résolution intitulée «La nécessité de lever le blocus économique, commercial et financier imposé par les États-Unis sur le Cuba», a été approuvé par l’Assemblée de 193 nations avec 188 voix pour, trois contre et deux abstentions. Les États-Unis, qui ont imposé le blocus contre le Cuba dans les années 1960, ont voté contre le projet de résolution avec Israël et Palau. Les États fédérés de Micronésie et des îles Marshall se sont abstenus, comme ils ont fait l’année dernière. La résolution, qui n’est pas juridiquement contraignante, a une fois de plus exhorté les États qui ont appliqué et continuent d’appliquer des lois et des mesures de blocus sur le Cuba à «prendre les mesures nécessaires pour abroger cet embargo dès que possible, conformément à leur système juridique».

Parmi les changements historiques qui se sont produits lors des élections présidentielles du 6 novembre aux États-Unis, l’un des plus remarquable fut la victoire, pour la première fois d’un candidat démocrate venu de la communauté cubaine de Floride. Cela, couplé avec les mesures d’ouverture timides mises en œuvre par le régime cubain, ces derniers mois, et la plus grande marge de manœuvre dont dispose à Washington un président qui ne peut être réélu, crée le meilleur scénario pour la levée de l’embargo économique des États-Unis sur Cuba, une relique de la politique étrangère nord-américaine qui a survécu jusqu’à présent malgré son inefficacité et le manque de soutien international.

L’impopularité de cette mesure est évidente depuis longtemps. Il est également évident que, après 50 ans, non seulement elle n’a pas obligé le gouvernement cubain à prendre des mesures pour démocratiser le pays, mais elle a souvent été le prétexte pour ne pas agir.

Si l’embargo a survécu jusqu’ici,  cela était du simplement au fait qu’il avait le soutien de la communauté cubaine en exil, avec une forte influence dans le sud de la Floride, un état clé lors des élections dans ce pays. Mais aujourd’hui cela a changé. Les nouvelles générations de Cubains nées ou ayant grandi  aux États-Unis ne se sentent pas obligés d’être loyales envers le Parti républicain sous prétexte qu’il est la seule garantie contre le totalitarisme et ils ne croient pas que la lutte contre Fidel Castro doit être leur raison de vivre. Pour la première fois, un cubano-américain du Parti démocrate, Joe García, a été élu pour occuper un siège pour la Floride à la Chambre des représentants. Plus éduqués dans la solidarité vis-à-vis de leurs familles et de leurs compatriotes de l’île que dans la haine qui obligea leurs ancêtres à choisir l’exil, cette génération sympathise avec des mesures qui visent à faciliter les échanges prises par Barack Obama et elle a le désir de les développer autant que possible.

Ce courant est également favorisée par tous ceux, en particulier en Floride, qui voient des opportunités économiques à Cuba et qui veulent que leurs possibilités de négoce ne soient pas limitées par des décisions politiques qui sont anachroniques. Les États-Unis favorisent les relations économiques avec d’autres pays communiste comme la Chine,  jusqu’à récemment ils ont permis un certain nombre d’échanges commerciaux avec des nations rivales comme l’Iran, et ils continuent à les permettre à d’autres, comme le Venezuela. Les entrepreneurs font partis depuis longtemps des secteurs favorables la levée de l’embargo.

Il y a encore des gens qui hésitent à franchir le pas. Les représentants républicains de la communauté cubaine au Congrès croient encore que la levée de l’embargo permettra de donner de l’oxygène au régime des frères Castro, précisément au moment où les deux approchent de la fin de leur vie.

Cet argument, cependant, est faible face au potentiel qu’offrirait le développement des échanges pour faciliter la transition vers la démocratie et encourager les réformes. La levée de l’embargo pourrait, en effet, améliorer les conditions économiques des Cubains. Mais aussi, il faciliterait la présence à Cuba de groupes d’opposition et, surtout, il mettrait entre les mains de l’opposition interne des instruments de mobilisation qu’ils n’ont pas aujourd’hui. Avec plus d’argent, plus d’ordinateurs, plus de téléphones mobiles, en ayant l’accès à Google et à Twitter, les possibilités de communiquer la réalité sur le système politique cubain serait considérablement amplifiées. En outre, il est probable  qu’une population moins anxieuse à propos de l’économie du pays sera également plus intéressée par la démocratie.

Barack Obama, qui a commencé sa présidence avec des gestes de bonne volonté envers le gouvernement de La Havane semble partager ce point de vue. Mais, frustré par le manque de réactivité du système, et en proie, comme ses prédécesseurs, au calendrier électoral, il a rapidement abandonné cette voie. Maintenant, plus préoccupé par son héritage historique, il a une belle occasion de faire quelque chose qui restera sans doute dans les mémoires comme le début de la fin du totalitarisme à Cuba. La levée de l’embargo aurait, ainsi des répercussions prévisibles, mais aussi des effets politiques et psychologiques qui permettront de marquer un avant et un après dans les relations des États-Unis avec Cuba et l’Amérique latine. À l’heure actuelle, cela est possible sans avoir à laisser peser sur le candidat démocrate à la prochaine présidentielle le lourd fardeau d’une défaite certaine en Floride. Mais plutôt le contraire.

Antonio Caney


Enrique   |  Actualité, International, Politique, Société   |  11 27th, 2012    |